dimanche 29 novembre 2015

1er dimanche de l’Avent : « Apprivoiser le silence »

Luc 21, 25-28.34-36
« Votre rédemption approche »
Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse
dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste comme un filet ; il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière.
Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »
Première séquence (00 à 02:19)
01
La vidéo de Laure commence avec les glouglous des bouteilles bleues remplissant les verres d’eau. C’est le tout début du repas.
Les Sœurs sont déjà assises, elles prennent leurs serviettes, se servent de soupe, de pain et d’eau. Leurs gestes gênés se heurtent, une serviette s’échappe dans un mouvement maladroit : est-ce la caméra ou le silence qui sont à apprivoiser ?
02
Pendant les deux premières minutes, la soupière en terre vernissée jaune passe de mains en mains, en une ronde ritualisée dans le sens inverse des aiguilles d’une montre.
03Dans une chorégraphie entre voisines, chaque Sœur dépose le dessous-de-plat en liège sur la table, annonçant l’arrivée du plat chaud et préparant le service pour celle qui la suit.
Quand tout est fini, la dernière servie fait glisser la soupière jaune au centre de la table et le ballet des cuillères portées à la bouche peut commencer.
Il y a, en fait, beaucoup de bruit dans la vidéo : les couverts posés sur la table, les couverts sur les assiettes, les plats glissés, les toussotements, faisant — sinon mentir, tout du moins — interroger le « silence ».
Le cadre serré et fixe sur la table prise en vue frontale et en perspective, donne toute la place aux objets, aux matières de bois ou aux transparences de verre, aux couleurs.
04
De ce monochrome de teintes marrons ou brunes, les bouteilles bleues, comme des petits bouts de ciel arrachés aux nuées et tombées sur la terre, sont, avec la fraicheur de l’eau et les verres transparents, un rappel des sources vives d’un torrent de montagne. La nature, et par elle toute la Création, se sont invitées en ce lieu.
Les assiettes blanches posées à même la table en bois foncé attendent, elles tracent comme des pointillés formant une parabole reliant les corps les uns aux autres, symbole de communion.
En ce premier dimanche de l’Avent, aux portes de ce nouveau temps liturgique et méditant avec l’évangile de Luc, Le repas en silence nous fait entrer dans l’exhortation de Jésus : « Tenez-vous sur vos gardes, […] Restez éveillés et priez en tout temps » (Lc 21, 34.36).
Le silence, l’attention fraternelle des unes aux autres, la simple présence, le temps passé ensemble, et la simplicité de cet instant de vie, ouvrent, en cette table, un espace d’attente et de désir …
Apprivoisons ce silence et cette mise à l’écart de nos activités compliquées, laissons la beauté de Dieu et sa prière habiter notre cœur.

Introduction : Le Chemin de l'attente

Méditations d’Avent

Introduction :



Le chemin de l’attente


Sept Sœurs du Carmel Saint-Joseph sont assises à table, ensemble, pour une vingtaine de minutes et partager un repas communautaire, en silence, un repas simple, composé d’une soupe de légumes, de pain, de fromage, d’un yaourt, et d’eau fraîche.
Rien ne se dit par la parole, il n’y a aucune histoire à raconter, aucune intrigue ni suspens dans l’action humble et presque banale. Pourtant le film n’est pas muet.
La caméra silencieuse et pudique de Laure Jaudon est posée au milieu d’elles, en témoin, pour tenter de saisir et dire un quelque chose de sa propre recherche d’artiste. Elle s’essaie à scruter et à entendre, l’œil en éveil et l’oreille grande-ouverte, pour dessiner, photographier, écrire et filmer l’au-delà du visible, non pour capter mais pour donner à voir ce qui se joue et se donne dans le silence, la pauvreté et la solitude.







Laure n’est ni croyante, ni mystique, mais elle s’approche des êtres et du mystère de la vie avec la grâce d’un battement d’ailes de papillon qui ne fait peur à personne, si bien qu’entre elle et celles qu’elle regarde, par son travail minutieux et discret presque secret, des petits éclats de l’éternel s’aventurent sans crier gare transfigurant la banalité en miracle du vivant.

Il m’a semblé que sa démarche tâtonnante de chercheuse à l’obscur et sa vidéo du repas silencieux pouvaient nous aider à avancer sur ce chemin de l’Avent, tels des mages partis dans la nuit à la quête d’une étoile brillante et lumineuse. C’est Laure qui sera notre petit Poucet, nous déposant quatre petits cailloux blancs, quatre petites pépites solaires, pour nous guider vers la crèche et préparer nos cœurs à fêter Noël.
Quatre temps de méditation pour quatre dimanches :
  • 1er dimanche de l’Avent, 29 novembre 2015 :
    « Apprivoiser le silence »
  • 2e dimanche de l’Avent, 6 décembre 2015 :
    « Attendre une bonne nouvelle »
  • 3e dimanche de l’Avent, 13 décembre 2015 :
    « Se tenir collés à la terre »
  • 4e dimanche de l’Avent, 20 décembre 2015 :
    « Se réjouir »
  • Bonus de Noël, 25 décembre 2015 :
    « Paix sur la terre aux hommes que Dieu aime »

samedi 28 novembre 2015

Regard d’artiste au Carmel Saint-Joseph

Regard d’artiste au Carmel
Quand une artiste des Beaux-arts s’immisce dans la vie religieuse

L’œuvre d’art

Laure Jaudon, Le repas silencieux, 2010, Vidéo, Durée : 5 minutes et 17 secondes.
Vidéo d’un repas de jeûne, un vendredi soir, au Carmel Saint-Joseph de Saint-Guilhem Le-Désert.

Vidéo présentée, dans le réfectoire des moines de l’abbaye de de Gellone, à Saint Guilhem-Le-Désert, lors de la NUIT DES MUSÉES 2013, sur le thème de « La sauvegarde du patrimoine visible et invisible, le SILENCE au cœur de l’abbaye », le samedi 18 mai de 20h00 à minuit.

L’artiste




Laure JAUDON, diplômée de l’ENSA (École Nationale Supérieure des Arts) de Limoges en 2011, et d'un D.U. de Création Cinématographique de l'I.U.T de Corte en partenariat avec le GREC (Groupe de Recherches et d'Essais Cinématographiques) en 2012, et présentée par la galerie AL/MA de Montpellier, en 2013.

Une Recherche sur le silence


À travers des lieux choisis qui deviennent des strates temporelles où se jouent la mémoire, les traces, la résistance à la disparition, l’oubli, c’est une tentative de faire vibrer à nouveau les ruines, les restes, aux abords de nous-mêmes, de ce qui peut être, encore. Des espaces où une autre temporalité s’invite, où il s’agit d’être presque en dehors, près d’un silence, au plus proche d’une respiration du monde. (Supervues)

«  Derrière une porte lourde et un long couloir éclairé par la légère lumière du jour nous montons des escaliers.
Le dernier étage, cinq cellules, celle de Céline, Suhad, Mariette, Nathalie.

Et la mienne.
Neuf mètres carrés, un lit, un bureau, deux armoires et une chaise.
Et une fenêtre.
Cette cellule sera la mienne. »

(Extrait de Latence, Laure Jaudon, Carmel Saint-Joseph, Saint Guilhem le Désert, 2010)

De la chambre émane une voix ; Latence de Laure Jaudon, étudiante aux Beaux-Arts de Limoges, raconte une expérience au Carmel Saint-Joseph, son entrée dans le quotidien de huit carmélites pour tenter de comprendre et d’approcher le silence et leur quête de silence.